13 avril 2022
Ensemble, faisons briller l’autisme
Qu’est-ce que l’autisme ? Si vous m’aviez posé la question en 2002, quand mon plus jeune fils avait quatre ans et qu’il ne connaissait que deux mots : oui et non, quand sa mère et moi étions tous deux épuisés – oh pire que ça, « épuisé » n’est pas un mot assez fort – je vous aurais juré que l’autisme est une maladie. J’aurais ri au nez de quelqu’un qui aurait prétendu le contraire.
Depuis, tellement de choses ont changé. Vingt ans plus tard, en 2022, je sais que je suis autiste, et que mes deux fils le sont. J’ai appris que l’ADN y est pour quelque chose, mais pas seulement. ET j’ai appris aussi que c’est compliqué d’en parler à cœur ouvert. Du moins, quand on veut éviter la polémique. Or être autiste, c’est souvent être direct en affaire, et je dois être très – mais très – prudent.
Mon objectif ici, toutefois, c’est de témoigner de mon cheminement, que j’ai fait en compagnie de mon épouse, dans l’éducation de nos deux fils, et… de leur papa.
– Stéphane Blackburn
Évidemment, je suis autiste depuis ma naissance, mais personne, à cette époque-là, ne soupçonnait l’existence du « syndrome d’Asperger » chez une personne au développement du langage précoce et qui montre des signes clairs de « surdouance ». Permettez-moi de mettre ce mot entre guillemets, puisque je suis personnellement opposé à la mesure de l’intelligence.
J’étais un enfant isolé, un « enfant de la clôture », et j’avais des comportements particuliers dont certains vous seront probablement connus : un accent français, un langage de prof, un mal-être terrible : extrême nervosité, pensées suicidaires, grands rires et grands pleurs… Et j’étais un pur TDAH.
La psychiatrie de l’époque proposait à mes parents mon envoi à des classes « à aires ouvertes », une mode du temps pour les surdoués. Mes parents n’ont pas écouté ce conseil, et je les en remercie. Je voulais être seul, en silence, dans un établissement aussi monastique que possible, certainement pas dans une espèce de gymnase ou plein de monde fait plein de choses différentes en même temps. J’étais hypersensible. Trop de lumière, trop de bruit, trop de sensations… et trop d’odeurs. Oh là là les odeurs… Oreille absolue, la musique triste me faisait pleurer dès ma petite enfance; mes parents m’ont fait commencer le violon à quatre ans. J’adorais toucher les choses, et j’avais le sentiment qu’il me manquait une information quand on m’interdisait de toucher un objet qui m’intéressait. En terminant, j’avais des tics nerveux faciaux.
Donc voilà. Je crois avoir bien résumé les comportements associés à l’autisme qui ont marqué mon enfance. Bien évidemment, je suis toujours TDAH, hypersensible, violoniste, couvert de tics nerveux, amateur de silence (à plus forte raison qu’à l’approche de mes 60 ans, je suis un acouphénique sévère), avec un QI complètement atypique, bref, je suis toujours bien moi.
Mais mon mal-être est disparu. Complètement. Et ça, c’est la chose la plus importante à retenir ici : ce qui compte, et je tiens à ce que ce soit la conclusion de mon témoignage, ce qui compte, tout ce qui compte (oui j’insiste), c’est le bonheur que peut atteindre tout individu humain. Autisme ou pas, tics ou pas, TDAH ou pas, QI haut ou bas… Rien de tout ça ne compte. Le sourire compte. Or on comprendra que notre culte de la vitesse, de la consommation, de la performance, de l’argent, du bruit et des flashes lumineux, rien de ça n’est bon pour les autistes.
Aujourd’hui je suis prof de philo au cégep, et occasionnellement chauffeur de camion (c’est un rêve d’enfance. J’adore tout ce qui a des roues). Je suis toujours violoniste, et un petit peu écrivain (mais j’ai toujours de la difficulté à me motiver). Je suis heureux d’avoir trouvé des milieux de travail auxquels j’ai pu m’adapter, mais… Je dois dire qu’en 2013, quand on m’a engagé comme prof, je n’ai absolument pas révélé mon diagnostic. Parce que j’avais déjà été membre d’un comité de sélection dans le passé, et je puis dire qu’une fois les candidats ressortis du local, on pouvait dire des choses assez immondes à leur sujet. Je m’imaginais bien ce qu’on pourrait dire du candidat qui a le malheur de dire : « Je suis autiste ». « Il va nous demander des conditions spéciales. Il va être antisocial. On n’a pas besoin de quelqu’un qui va nous briser le climat de travail »… C’est bien ce que je m’imaginais. D’ailleurs, tout était contre moi en 2013. Déjà assez âgé pour un nouveau, mon CV présentait surtout des années de camionnage, puisque j’avais déjà démissionné d’un job de prof de philo quelques années auparavant. Cette première carrière m’avait valu deux burnout, des crises de panique et un trouble anxieux sévère. Je ne connaissais pas mon état, et qui d’autre aurait pu savoir…
Si on m’avait invité à l’entrevue en 2013, c’était surtout par curiosité, m’a-t-on avoué entre amis il y a peu de temps. Mais… je l’ai gagnée, cette entrevue, et j’ai obtenu l’emploi. J’avais été très autiste dans ma stratégie : j’avais préparé un plan de cours complet pour un cours fictif de… science des religions. Avec un document de motivation et un dossier détaillé. Mes futurs collègues avaient décidé mon embauche avant même que j’aie quitté la salle. Ça a parfois du bon d’être autiste…
En 2017, je participais à un forum sur l’autisme tenu à Québec sous l’égide de la ministre Lucie Charlebois. On m’avait demandé de faire le mot d’entrée : une présence au micro d’une dizaine de minutes au tout début de la journée. Après la fin de semaine, je suis retourné au travail comme d’habitude. Mais j’avais des commentaires. Beaucoup de commentaires, et des félicitations. Mais de quoi ? C’est un collègue du département de philo qui m’invita à lire les journaux. Il y avait ma tête, en gros, très gros, à la une du Soleil, de la Presse et du Journal de Montréal. Oh là là…
J’ai senti le feu me monter aux joues. Il y avait eu un forum pendant toute une fin de semaine, et ils ont visé le gars qui faisait l’entrée en matière ! C’est ainsi que j’ai fait mon coming-out au cégep… certainement sans le vouloir. Mais les réactions ont été très positives, vraiment. Et donc, je crois qu’il y a de l’espoir. Je pense qu’il est de plus en plus possible de se tailler une place dans le monde du travail. Peut-être pas là où on aimerait nous voir (en camion !) mais là où on peut trouver du bonheur.
Il y a vingt ans, donc, Olivier avait quatre ans, et François six ans. Celui-ci était un petit garçon au tempérament extrêmement gentil, doux, plein de prévenance. Il réfléchissait sur les subtilités de l’humour avec un questionnement très rationnel : Pourquoi tu ris, Papa ? ou : J’ai fait une blague, Papa, pourquoi tu ne ris pas ?
François ne nous inquiétait pas du tout. Cependant, il ne se faisait pas d’amis. Il sortait, mais ne rencontrait personne avec qui jouer. Il allait jusqu’à demander à des dames qui passaient dans la rue si elles voulaient jouer avec lui. Bien sûr, dès que nous le pouvions, nous faisions office d’amis. Je vous rappelle (mais est-ce nécessaire) que nous étions bouleversés et à bout de souffle à cause de son petit frère qui, lui, ne parlait pas du tout. Enfin : je l’ai dit, il connaissait deux mots : oui et non. Le reste, l’écholalie, s’apparentait aux répétitions d’un perroquet. Le philosophe en moi savait bien que le langage propre à l’être humain n’a pas cette structure préfabriquée. Mais un jour de 2002, j’ai vu Olivier parler pour la première fois de ma vie. J’avais été invité à une « journée porte ouverte » du centre de stimulation l’Envol. Or Olivier, en entrant avec moi, retira son manteau lui-même, le posa sur un crochet, plaça ses bottes correctement dessous (déjà là, j’étais bouche bée : je le voyais organiser ses gestes selon un ordre cohérent !) puis il s’installa devant un gros cahier rempli de pictogrammes. Il en choisit distinctement quatre, et il savait clairement ce qu’il faisait.
Je ne sais pas comment exprimer cette victoire. Voyez-vous, j’ai le cœur gros au moment même d’écrire ceci. Mon épouse, moi, nous n’arrivions à rien. A rien. Je n’établissais aucun contact avec ce si beau petit garçon, aux yeux sombres qui regardaient ailleurs. Mon fils.
Mais là, il prit le bandeau sur lequel il avait placé les pictogrammes, et s’en alla voir une éducatrice. Il tira sur son gilet et elle se retourna vers lui en disant : « Oui, Olivier, que veux-tu ? » Puis, pointant les pictogrammes l’un après l’autre, il prononça distinctement : « Catherine, je veux du yogourt s’il-vous-plaît. »
Olivier venait de parler.
Je sortis.
Incapable de retenir mes larmes, je suis retourné chez moi. Je pleurais à la place d’Olivier. Je pleurais comme un enfant de quatre ans. Mais de joie. Olivier venait, pour la première fois, de faire preuve d’une indéniable intelligence. Un jour, nous allions communiquer.
Mais, cela ne réglait pas les nombreux problèmes moteurs qui l’envahissaient. Nous étions constamment sur nos gardes, anticipant l’une de ses nombreuses chutes, car il n’avait aucun réflexe de protection, et son visage, sans mains pour amortir le choc, frappait le plancher violemment. Ce manque de réflexes de base nous empêchait de voir en Olivier un adulte capable d’exercer un quelconque métier manuel.
De mon côté, j’avais développé, parmi mes innombrables intérêts restreints, un appétit vorace pour l’étude de l’autisme, qui devenait, soudain, un sujet drôlement intéressant. Quelque part en 2004, j’étais tombé sur le site web de la Fédération québécoise de l’autisme. Comme je voulais en savoir le plus possible, je lisais l’ensemble du contenu du site. Je suis donc tombé sur la description du syndrome d’Asperger. Et là, je suis devenu dubitatif.
Cela ne ressemblait-il pas à François, sous certains aspects ? Posant la question à ma conjointe, elle me fit clairement part de ses réserves quant à investiguer François alors qu’on avait déjà tant à faire avec Olivier. Elle avait raison, François ne causait aucun problème, et nos ennuis actuels nous suffisaient. Pourtant, n’écoutant que mon intérêt (restreint), je continuai à lire…
…et j’ai senti tout d’un coup un shoot d’adrénaline me traverser le corps. Ce que le syndrome d’Asperger décrivait là, c’était moi. Moi ! Comment vous dire ? C’était exactement comme si on vous disait : « Vous vous croyez libre, mais vous ne l’êtes pas. Vous suivez un programme tout réglé pour vous. Vous êtes déterminé dans votre personne par vos gènes. Dans votre enfance, vous aviez l’accent français. Vous êtes hypersensible, vous n’aimez pas qu’on vous touche mais vous avez besoin de toucher à beaucoup de choses. Vous êtes anxieux. Distrait. Vous n’avez pas eu d’amis dans votre enfance. On aimait faire de vous un bouc émissaire. »
Bon sang. Ça fait mal, et en même temps, quel, mais quel soulagement ! C’était mon mal-être que j’identifiais là, tout d’un coup, sans y être préparé. Si vous me demandez aujourd’hui ce qui fait de moi un homme heureux, je vous répondrais en un mot : Savoir. Je sais qui je suis. Je suis libre, mais je connais mes limites et mes talents. J’en tiens compte et je m’exerce à m’améliorer. Autiste ou pas, connais-toi toi-même.
Tout mon cheminement m’a amené à repenser ma vision de l’autisme. L’autisme, ça ne correspond pas à une maladie. Une maladie, ça s’identifie, soit comme corps étranger, soit comme anomalie observable et identifiable. Je pense au syndrome de Down, par exemple. Et même là, le syndrome de Down laisse les gens qui en sont atteints heureux et capables de vivre. Je ne sais pas si ça entre dans la catégorie (parfois assez arbitraire) de « maladie ».
Mais j’entre là dans la polémique, j’en ressors tout de suite.
Les années qui suivirent furent fertiles en développement personnel, en fortification de notre couple et en croissance familiale. J’ai reproduit le modèle de mes parents en exigeant que mes fils pratiquent deux activités chacun en dehors de l’école, avec « obligation » d’atteindre son plein potentiel, comme je l’ai fait moi-même, enfant puis adolescent, avec le violon et la natation. François choisit le karaté et le violon. Olivier opta pour le karaté, et le piano. Les deux garçons se déplurent en musique, et nous leur avons permis de changer leur activité musicale pour autre chose. François s’inscrivit en natation, et Olivier devint membre d’une équipe de baseball. En karaté, les deux garçons s’amusaient et progressaient. À leur rythme, bien entendu.
Olivier en était à sa ceinture orange, quand il me prit l’idée de le motiver avec une de ses passions : je lui promettais l’automobile de ses rêves quand il obtiendrait sa ceinture noire. Bien évidemment, je ne croyais pas qu’il se rendrait là. Il était toujours particulier dans ses gestes, le baseball nous le révélait comme un enfant ayant des talents surprenants pour la course et la puissance du tir, mais aussi avec des difficultés qui l’auraient empêché d’aller plus loin. Au karaté, s’il était vraiment impressionnant en combat (en combat, ce petit garçon qui fait une crise en étoile de mer dès que quelque chose ne se déroule pas comme prévu ?) et qu’il avait développé d’assez bons réflexes, je me disais bien que la ceinture noire et le titre de sensei, c’était pour une élite. Mais Olivier s’est pris au jeu, et m’a affirmé que ce serait une Volkswagen Beetle. Pas la New Beetle : l’antique, la vraie. Je la lui ai promise de bon cœur.
François et Olivier ont toujours eu une merveilleuse relation. Ils ont toujours été, et sont toujours, deux complices, deux copains, deux admirateurs de leur frère. Comme François est un Asperger (dont le profil diagnostique est pratiquement identique au mien), et qu’il a appris tôt dans sa vie à se comprendre et à s’accepter, son parcours a été régulier et relativement sans histoire. Il a fréquenté l’école Vision 20-20 pour un D.E.P. puis il s’est trouvé du travail au Cétal, en attendant mieux. Il a ensuite pris la décision de commencer un DEC en informatique, qu’il est sur le point de terminer. Il est devenu un nageur accompli, et il a atteint la ceinture brune en karaté. Jusqu’ici !
Quant à moi, bien, après quelques années sur la route, j’ai investi de mon temps pour la cause de l’autisme. J’ai écrit un petit livre, fait des conférences, j’ai été membre du comité exécutif d’Aut’Créatifs, sympathique association d’autistes militant pour une image positive de l’autisme.
Depuis peu, je me suis retiré (à peu près !) de la cause de l’autisme. J’enseigne la philo, et à chaque année, j’incarne le Père Noël, bénévolement, pour des enfants à besoins spéciaux. Et pour comble, mon épouse fait une très belle Mère Noël !
Quant à Olivier, bien… Il a continué de progresser. Mais quand je parle de progresser, ça fait peur. On l’a admis à l’École-Entreprise de Princeville, puis à la Fermentière de Warwick. Il continue ses études secondaires tout en travaillant dans… un dépanneur. Je vous demande de bien vouloir noter : il est caissier dans un dépanneur. N’est-ce pas quelque chose de rapide, de multitâche, d’exigeant socialement ? Ne confronte-t-il pas quotidiennement des personnes agressives, qui pour un masque, qui pour une pompe qui ne fonctionne pas ? N’est-ce pas plein d’inattendu, de stress, de loterie de cigarettes de chips de livraisons de bière et alouette ? Et pourtant, il est le préféré du gérant, qui demande à l’avoir à plein temps. Olivier lui, ne demandant qu’à bien faire, hésite. Nous l’avons invité au restaurant récemment, pour lui dire qu’il a fait ses preuves, dans ce dépanneur-là. Il y est depuis deux ans, et il n’a commis aucune bavure. Il est socialement très, très capable, maintenant. Il parle français et anglais indifféremment et apprend l’espagnol avec une application gratuite. Il est libre d’étudier à plein temps, de travailler où il veut, de faire ce qui lui chante. Il a des valeurs solides, veut bien faire, va bien faire. Et son bonheur compte plus que tout le reste. Tout le reste. Quel est son Q.I. ? On s’en fout. Il est autiste (je dois dire T.S.A.), je m’en fous. Il est Olivier. Voilà qui il est. S’il est heureux, dites-moi, en quoi devrions-nous nous en faire encore ?
J’ai l’air de conclure, mais non. Parce qu’Olivier a encore accompli des choses. À la Fermentière, il a été mis en candidature pour la Médaille du Lieutenant-Gouverneur pour son implication communautaire. Je veux dire… Comment ça se fait ? Implication communautaire ? Son papa s’est bien posé la question, mais, cette médaille, mon gars l’a obtenue.
Puis il y a le karaté. Olivier progressait régulièrement. À tel point que je m’en suis inquiété (pour la Beetle). En tout état de cause, j’ai eu la bonne idée de négocier une Beetle moderne, mais l’édition « Classic », parce qu’en hiver les vieilles VW n’ont pas de chauffage. Il a accepté mon offre.
Il a gagné sa ceinture noire. Il l’a ! Olivier est Sensei. Et il se promène dans une VW Beetle Classic 2015. (Aurais-je mieux fait de me taire ?)
Tout n’est pas parfait. Il a fait une dure, très dure peine d’amour, mon grand. Nous sommes trois autistes dans une même maison, c’est bordélique chez nous, et je salue l’extrême résilience de ma conjointe à ce sujet. Nous avons nos particularités. Cependant nous sommes tissés très serrés, et si Papa et Maman se préparent à garder les gars – ou l’un d’eux au moins – à la maison pour toujours si besoin est, nous sommes aussi fiers et heureux de le faire.
Je ne sais pas ce qui adviendra des enfants que je rencontre en Père Noël. Je ne sais pas qui connaîtra une fin heureuse. Rien n’est garanti. Avec un enfant, rien n’est jamais garanti. Un enfant ne constitue pas un droit. Un enfant ne peut pas et ne doit pas rencontrer d’attentes minimales pour être aimé et encouragé. Il doit l’être toujours, inconditionnellement, pour devenir le meilleur… le meilleur de ce qu’il peut être, quel que soit ce « meilleur ». Je suis le meilleur de ce que je peux être, et c’est ça qui me rend heureux. Je ne me compare pas, je ne suis pas en compétition : je donne simplement le meilleur de moi-même. Nous avons exigé la même chose de nos fils.
Dans le milieu de l’autisme, j’ai rencontré toutes sortes de gens. Des parents qui estiment que l’autisme est une maladie, parce que ça leur permet de rêver d’une guérison. Soit ! Mais aussi des charlatans qui misent sur cet espoir pour vendre du rêve à prix fort. J’ai aussi rencontré des gens parfaitement au courant des subventions et autres sommes d’argent qu’on peut obtenir quand on a un enfant handicapé (à se demander ce qui compte le plus, l’enfant ou l’argent). J’ai vu des parents regarder leur enfant avec condescendance, ignorant par là qu’ils forgeaient une bien mauvaise estime de soi au petit, qui sent toujours ces choses-là. Quand j’en suis témoin, je n’en parle pas. Mais quelqu’un comme moi, un autiste, même avec les cheveux blancs, n’a qu’une envie : crier que tous les enfants méritent d’être aimés tels qu’ils sont, et pas autrement. Que leur parcours est leur parcours et pas celui de qui que ce soit d’autre. Que votre enfant soit Charlotte, Mia, Liam, Benjamin, Amélia, Aiden… Rien d’autre. Tout ce qui s’ajoute, ce sont des catégories, qui changent, qui changent… et qui servent trop souvent d’appui psychologique alors même qu’elles limitent artificiellement ce que tout enfant serait par ailleurs capable d’accomplir, sans préjugé.
Cependant, nous n’aurions pas été capables de réaliser ce bel ensemble qu’est devenue notre famille, sans l’aide extraordinaire des services présents dans la région Bois-Francs – Érable. Nous avons été des clients assidus du Centre de stimulation l’Envol. Nous avons obtenu beaucoup d’aide auprès d’Autisme Centre-du-Québec. Le système scolaire et l’initiation au monde du travail pour nos jeunes est superbement pensé. L’Ami-Temps des Bois-Francs a été un milieu de socialisation précieux pour Olivier, pendant plusieurs années. Enfin, le CRDI n’est pas en reste : Olivier y est toujours le bienvenu, et c’est une approche holistique qui y est offerte. C’est grâce au CRDI que mon grand a trouvé son emploi.
Olivier projette de devenir volcanologue. Il est d’une intelligence implacable sur ce sujet. Il veut aller étudier la géologie, et ma foi il est déjà capable de rendre la matière vraiment intéressante (même celle-là). Sera-t-il prof ? Globe-trotter ? Ou routier peut-être. Tout ça, c’est dans ses projets.
Il me reste à lui montrer comment on se fait une petite amie ! (Quelqu’un a un truc ?)
écrit par Monsieur Stéphane Blackburn